Réflexions sur l'érotisation de la violence

J’ai ”cherché“ les violences sexuelles: quelles responsabilités?

9 mars 2019

Se sentir coupable pour ne pas se sentir impuissante

De manière générale, les victimes se sentent responsables des violences qui leurs sont infligées. C’est un mécanisme de défense bizarre qui sert à se donner l’illusion que, quelque part, nous sommes décideuses des choses qui nous arrivent : en effet, aussi dure que puisse être l’idée que quelque chose est de notre faute, c’est souvent MOINS PIRE que l’idée que quelqu’un (surtout quelqu’un que nous aimons) jouit de notre douleur, profite de notre vulnérabilité, n’a pas d’empathie pour nous, nous violente de manière injuste, et que nous avons été impuissante à nous défendre face à ces mauvais traitements !

En plus, le fait d’avoir été « victime » de quelqu’un est très mal vu dans notre société : les victimes sont souvent désignées comme des personnes faibles ou idiotes. En conséquence de quoi, ce sont elles qui ressentent de la honte, alors même qu’elles ne devraient pas, puisqu’elles n’ont rien fait de mal !
Ainsi, plutôt que de faire face à leur honte, les personnes violentées préfèrent se convaincre qu’elle sont responsables des violences qu’elle ont vécues. Elles se disent « je regrette ce qu’il s’est passé mais c’est moi qui l’ai voulu » « c’est moi qui l’ai décidé » « ce n’était pas vraiment de la violence » « au fond, j’étais ambivalente » « je suis une femme forte qui a expérimenté des choses ». Et cela les empêche de remettre la responsabilité au bon endroit, c’est à dire sur les épaules de l’agresseur.

Le sentiment de culpabilité empêche la juste reconnaissance des responsabilités

Les personnes traumatisées recherchent la dissociation

Dans le cas des personnes qui ont des conduites affectives dissociantes (se mettre en couple avec un homme violent, pratiquer le bdsm) le sentiment de culpabilité est renforcé, car les victimes ont bien conscience qu’une part d’elles « recherche » la violence, mais qu’elles ne savent pas pourquoi. Elles finissent donc généralement par penser qu’elles sont perverses (elles s’identifient à la perversité de leurs agresseurs).
Par ailleurs, elles développent souvent des dépendances à la violence ou aux violenteurs, dépendances qui les font dans un premier temps se sentir mieux (en fait, plus dissociées), mais qui renforcent leurs sentiments de perversité et de nullité. Evidemment, les personnes n’ayant pas conscience de leurs traumas ne réalisent pas que leurs conduites à risque (alcool, drogue, recherche de risque sexuel) sont des tentatives d’auto-traitements.

Les agresseurs sont responsables de leurs actes

Peut-être as-tu voulu séduire un homme, obtenir son amour son respect, son engagement en lui offrant du sexe violent ? Peut-être voulais-tu « te sentir vivante » ? Peut-être t’es-tu rendue compte que tu ressentais du soulagement ou de la jouissance physique lors de violences ? Peut-être même t’es-tu inscrite sur un site de rencontre fetish ?
…Cela te rend-il pour autant responsable des coups qu’il t’a mis ou des violences qu’il t’a infligées ?

Sortons 2 minutes du contexte sexuel pour un petit exercice : imaginons que pour une raison ou pour une autre, tu ailles voir un homme, et que tu lui demandes de te mutiler ou de te tuer, que cette homme passe à l’acte et qu’il se retrouve en justice : trouverais-tu normal qu’il se serve de ta demande comme d’une défense ?

Il semble assez évident que si on demande à quelqu’un de commettre un meurtre, une personne normalement constituée répondrait NON (et serait surement assez choquée).  

Et bien pour le viol et les violences sexuelles c’est pareil.

S’il peut arriver, dans un moment de colère, de fantasmer sur le fait de frapper ou de tuer quelqu’un, en revanche, le passage à l’acte est immoral et illégal.
S’il peut arriver de fantasmer sur le fait de frapper ou de violer quelqu’un, en revanche le passage à l’acte est immoral et illégal.

Si tu vas voir un mec et que tu lui demandes de te violer ou de te taper dessus, et que le mec le fait, il est responsable de ses actes. S’il avait été sain et bienveillant, il aurait refusé avec gentillesse, se serait fait du souci pour toi, t’aurait peut-être demandé pourquoi tu avais de telles idées, et t’aurais peut-être conseillé d’aller voir quelqu’un pour en parler.

La réaction normale face à une personne qui demande à être tuée, violée, humiliée ou frappée est de s’inquiéter pour elle, pas de passer à l’acte.

Si quelqu’un a profité de ta vulnérabilité pour te faire du mal ; si quelqu’un a sur toi des rapports sexuels qui te font te sentir absente, coupable, triste ou sale ; si tu sens que ta relation actuelle est mauvaise pour toi mais que tu « n’arrives pas à t’empêcher » d’y retourner, tu peux obtenir de l’aide au 0800 05 95 95.